• Quelque chose s'apaise qui depuis longtemps me faisait courir. Mais pourquoi avoir tant couru ? Pourquoi une telle urgence ?

    Toi aussi, c'est étrange alors que tu vas d'un pas tranquille tu sembles n'être qu'un bouillonnement, comme si nous avions peur de nous endormir dans la gueule du loup.

    Je suis encore aveugle et sourde, je n'entends pas mon corps, comme tu entends le tien, et pourtant il se dit en sensations qui restent inaudibles pour la raison. Lorsque je parle de voir, je ne parle pas de la même chose que toi.

    « Une douleur dans le doigt, un message est envoyé au cerveau, à quoi va s'intéresser l'esprit ? ». Penses-tu que ce soit dans ce circuit que nous perdons l'accès au langage interne, là où les informations se sont formatées ?

    A quoi devrions-nous être attentifs pour enrichir la perception du joug du mental ?

     

    Je crois que le bouillonnement est inévitable. C'est la sensibilité qui le produit, « bienheureux les sensibles » qu'il disait (Rires).

    J'ai lutté jusqu'à ce jour pour que ne me gagne pas la désespérance, il y a quelque chose en moi qui ne renonce pas, qui refuse de croire qu'il n'y a rien à faire.

    Je crois que le changement est toujours un besoin, davantage qu'un désir, c'est donc toujours une réaction. C'est ainsi que se veut la vie dans ce monde.

    Que le changement intervienne après une mutation du monde est une façon de dire les choses, parce que tout changement engendre également une mutation du monde. De cette façon, le monde et le « vivant » sont à égalité réactifs et créatifs.

    En vérité je crois bien que nous disons la même chose à propos de « voir », car rien ne se fait dans la tête sans sa correspondance aux organes, à tout le corps. La différence sans doute se situe là où l'on pense avoir saisi les images, mais il n'y a qu'un seul processus.

    La mise en images a bien lieu dans le cerveau, la « conscience de la pensée » est trop souvent centrale pour nous, la plupart des hommes ignorent même qu'elle n'est pas la seule conscience et qu'à côté de la conscience du corps, elle est peu de chose.

    Une douleur au doigt, justement, la douleur n'est que pour l'esprit, pour le corps une blessure est bien autre chose qu'une douleur.

    Raison pour laquelle selon les cultures les hommes ne ressentent pas les douleurs de la même manière. L'hypnose démontre « où et comment » se forme la douleur, par le même chemin elle montre comment l'on peut la neutraliser.

    Nous ne connaissons pas la réelle douleur, nous ne connaissons que la face que l'esprit s'invente, mais lorsque le doigt est blessé, il y a bien transmission d'informations jusqu'au cerveau, parce que tout le corps doit savoir, tout le corps va participer, le « centre nerveux numéro un » agit comme un chef d'orchestre.

    Sans doute qu'avec une longue pratique de la méditation, autrement dit d'une attention dirigée, nous pourrions être davantage témoins de ce que le corps organise pour la réparation de ce doigt, mais l'effort serait injustifié, car porter une attention particulière à une petite blessure représente un manque d'attention ailleurs.

    Laissons faire le corps dans ces terrains-là, il n'a pas besoin de notre esprit qui a tant à faire ailleurs.

    Les activités de notre esprit sont étroitement liées aux domaines de la violence, agressivité, peur, rassurance. C'est là qu'il nous faut porter notre attention.

     


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  • Le passage d'une lueur à travers la brume

    Elle vient de l'autre côté, celui qui parle avec le monde

    Il envoie ses images flottantes comme des plumes

    Sur un vent d'esprit continu qui inonde

    La face rationnelle de ma personne.

     

    Le voici bousculé dans son sommeil

    Saisissant autant que possible ces runes

    Comme des papillons dans son filet de treille

    Il court, il court par-dessus les dunes

    Pauvre comme un insensé qui raisonne.

    Merci à toi de m'avoir invité à marcher à tes côtés.

     

    Il y a quelques fois cette tristesse de plomb qui m'envahit, je sais que la laisser faire serait encore plus triste, laisser l'expression d'une perversité. Je n'aime pas me sentir faible, et je me sens faible lorsque je laisse s'imaginer en moi, une cause justifiée au regret, au souvenir de la douleur, ou encore à une peur de ce qui peut venir.

    La force est là, la force réelle et belle. Elle est dans le rappel de la conscience au présent, rien n'a suivi derrière nos pas et il ne sert plus à rien de nous inventer quelques raisons de frayeur. Comme je n'aime pas me sentir glisser sur le toboggan de la plainte, entendre en moi la voix qui veut me vendre au plus offrant en criant « regardez-le ! Regardez comme il a souffert et voyez comme il est prêt encore à souffrir!! »

    Il y a quelques fois ces deux ou trois larmes qui coulent au coin de l’œil, sans doute viennent-elles d'un pays enfoui dans ma mémoire, un pays si sec qu'on ne verra aucune oasis, une terre brûlée et stérile où l'air y a le goût de l'urée acide.

    Et il me vient le désir de les regarder s'écouler sans jugement, de les goûter de la langue, avec sur le visage la même expression que celui qui contemple son album photo.

     

    Tu vois Michelle, ces larmes sont encore un défi, elles me narguent et me tendent des cordes au travers du chemin.

    Mais comme elles sont touchantes, comme elles me séduisent avec leurs parfum d'humanité. Je ne veux surtout pas céder à leur charme.Vouloir les bannir à jamais serait encore leur accorder trop d'attention, alors je les laisse couler lorsqu'elles le veulent, mais pas plus de trois ou quatre, au-delà ce serait faiblesse.

     


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  • Aujourd'hui ce fut une journée difficile, je me suis souvenue du chemin où un jour tout était facile comme si tout portait, et tout à coup comme si c'était l'inverse qu'il faille tout porter.

    Aujourd'hui j'ai labouré la terre.

     

    (Sourire)... tu as semé ?

     

    C'est ce que j'ai fini par me dire.

    Parce que même si on admet qu'il est naturel, ce mouvement est forcément par moments un effort.

    Alors la souffrance dont tu parlais a-t-elle à voir avec ça ?

    Y-a-t-il réellement une souffrance de l'esprit qui ne soit pas la conséquence d'une résistance psychologique ?

     

    La souffrance est nécessaire parce qu'elle fait partie du principe de l'évolution. Un sujet qui ne souffrirait pas programmerait en lui des messages de dégénérescence.

    La façon dont on traverse les instants de la vie engramme des messages codés génétiquement.

    Si ces messages disent « la vie est cool ici » d'une façon trop répétitive, les codes enregistreront cette valeur et il s'en suivra que moins de moyens de défense ou d'aptitudes seront entretenus.

    C'est ce qui se passe par exemple dans la culture des plantes, le fait de les cultiver représente une forme d'assistance pour elles.

    Ainsi, la vie leur est plus facile dans un premier temps, dans un second temps, leurs agresseurs deviennent plus dangereux, ce qui nous entraîne dans une spirale montante et perverse. Il nous faut développer de plus en plus de moyens pour lutter contre leurs agresseurs et ceux-ci, au contraire encodent des messages qui disent : « P... la vie devient rude ici ! ».

    Ainsi leur programmation les dote de moyens de défense encore plus efficaces.

     

    Oui, nous faisons partie de ce mouvement du vivant, et considérer la souffrance comme signe d'échec est contre nature. Se complaire en elle aussi. Lutter contre elle aussi.

    Vivre cela en paix, enfin la paix n'est pas le bon mot. Juste sans se faire plein d'idées négatives sur le sujet, vivre l'instant. C'est ça, non ?

     

    Voir, c'est accepter. Lorsque tu fais l'expérience de ce phénomène, tu comprends vraiment que ta souffrance t'a fait grandir. Si tu sais être honnête avec elle, et ne pas oublier qu'elle fait partie des artisans qui te forcent à te dépasser.

    Éprouver un regret représente une forme d'ingratitude et d'hypocrisie.

    Regretter la souffrance, c'est comme refuser le cadeau de la vie qui nous est fait. Mais aussi au monde lorsque la vie décide de nous faire le cadeau de mourir.

    Quand je meurs, c'est un cadeau que je fais au monde.

     

    Ces mots-là sont pleins de lumière, et je suis en accord parfait avec eux. Oui, il y a des jours où l'on porte quelque chose qui n'est pas seulement de sa personne. Le vivre comme un cadeau...

    Cela change tout, sauf si on s'en fait un orgueil.

    Mais la vraie souffrance ne laisse pas la place pour ce genre de fantaisie. Oui, pas de place pour ça.

     

    Regretter sa souffrance c'est la multiplier par quatre.

    Les « agents d'encodage » ne savent plus comment traduire et entraînent une attitude interne périlleuse, ce que la science appelle « la dépression ».

    Les données ajoutées par la multiplication ne s'engramment pas de la même façon, elles ne trouvent pas les bonnes cases.

     

    Oui, ça c'est quand la souffrance s'installe.

     

    Ce n'est pas la souffrance qui s'installe. La vraie souffrance ne s'installe jamais. J'aime beaucoup une phrase de Nietzsche qui dit : « Ce qui ne te tue pas te rend plus fort ».

    La vraie souffrance ne s'installe pas, parce qu'avec elle il n'y a qu'une seule alternative survivre, ce qui signifie s'adapter et triompher, ou mourir.

     

    Il en est ainsi, alors qu'est-ce qui s'installe ? L'image du moi en souffrance ? L'auto-apitoiement ?

     

    Oui.

     

    Cette attitude face à la souffrance est malmenée par l'ambiance générale, la souffrance est très mal considérée.

     

    (Rires)... on s'en fiche de comment on peut la considérer, elle a quatre milliards d'année !

     

    Mais la personne doit faire deux choses, avoir une juste attitude face à la vie et faire face à toutes ces influences pernicieuses de la « bonne pensée » qui n'est pas la juste pensée.

     

    J'en vois toujours qu'une seule. Les influences n'existent que si on le veut bien.

    Je veux parler de celles qui nous inciteraient à penser d'une façon ou d'une autre.

     

    Oui, c'est une affaire d'ego, d'image de soi, je suis d'accord, toutes les influences passent par ce canal.

    Alors, on peut dire qu'il n'y a pas d'état stable comme la félicité, cela est impossible, pas de vie dans ce cadre-là.

     

    La stabilité est justement assise en équilibre entre joie et souffrance, la voie du milieu.

     

    Tu parles là de la juste attitude face au mouvement de la vie ?

     

    Oui.

     

    Regarder ce que la vie fait en nous.

     


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  • Tout ça est trop démesuré, trop éloigné de la nature, trop dans l'artificiel. Est-ce que ce que je vois là, à petite échelle, est ce qui se passe dans le vaste monde ?

     

    Ce qui se fera sera juste.

    Quel qu'il soit, ce sera juste.

     

    Juste... au regard du tout, oui, bien sûr... mais tant de souffrances !

     

    Sans souffrance pas de vie.

    La souffrance est le prix de la vie et plus elle est belle, plus elle se nourrir de souffrance.

    Mais le regard que l'on pose sur la souffrance n'est ni serein, no objectif.

     

    Alors la vie est une mangeuse, et les anciens lui faisaient des sacrifices.

     

    Tout le monde lui fait des sacrifices depuis la nuit des temps. Rien n'a changé et rien ne changera. Seulement les formes sans doute.

     


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  • Comprendre signifie prendre en soi.

    Rien autant que l'absolu ne réside en nous aussi pleinement. C'est pour cette raison que je dis qu'il n'y a rien à comprendre.

    Ce sont des ruses de l'égoïté.

     

    Si, si, il me semble qu'il y a des choses à comprendre...

    Je m'explique... L'égoïté comme tu dis, devant cette chose lorsqu'elle se manifeste avec plus de force ne reste pas inactive et la raison non plus, à ton insu, et même le corps, et les sensations, et la souffrance.

     

    Oui, mais c'est donc les souffrances qui sont à comprendre. Rien de plus.

     

    Ce n'est pas si facile de vivre l’intensité, tu ne vas quand même pas me dire le contraire !

     

    Tu dis vrai, ce n'est pas facile.

     


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