• Le partage ne divise pas le pain en deux.

    Il le multiplie, cela n'existe plus par les temps qui courent.

    Tous les jours je partage en multipliant la conscience.

     

    Je ne suis pas à la hauteur là, et je ne vais pas essayer de mouliner ça pour dire « ah oui, je comprends ».

    Parce que je pourrais toujours me donner l'impression d'avoir compris et même que ça pourrait être vrai, mais aussi tellement faux.

     

    Je n'ai pas l'impression que ce soit compliqué.

     

    Quoi qu'il en soit, j'aime ces mots que je ne comprends pas. Ce sont ceux-là qui s'éclairent de l'intérieur, promesse d'autre chose qu'une simple compréhension intellectuelle.

    Le don est-il de même nature ?

     

    Le don est l'acte qui permet le partage.

    Mais le don n'est qu'à soi-même.

    C'est la raison pour laquelle cela multiplie.

    Si je me donne (à moi-même) pour toi, si tu te donnes pour moi, on multiplie. C'est simple non ? Bien que peu répandu comme conception des choses, je te l'accorde (Rires).

     

    C'est la multiplication qui fait le don à soi-même, veux-tu définir ce soi-même ? Il ne s'agit pas de la personne...

     

    Il s'agit de la totalité de l'être, la personne y compris.

    Tu te donnes à toi-même, c'est ainsi que l'autre peut recevoir, s'il se donne à lui-même. Mais c'est tout le monde qui reçoit en fait.

    Quand deux êtres partagent, c'est l'univers qui multiplie et ce que l'univers multiplie, c'est le monde qui le reçoit.

     

    Oui, que la partage soit reçu par tous, cela est une évidence. Ce que je vois mal... c'est se donner à soi-même, par nature nous sommes complets... le manque est une illusion !

     

    Non, ce qui nous rend complet justement, réside dans l'acte de se donner à soi-même.

    Lorsqu'on ne sait pas de donner à soi-même, il se produit des fuites dans notre enveloppe et notre complétude disparaît dans ces fuites comme un cosmonaute serait vidé par le moindre trou de son scaphandre par l'aspiration du vide cosmique.

    J'approche là... on pourrait dire qu'il n'y a qu'à soi que l'on puisse donner, c'est illusoire de croire que l'on donne à l'autre.

    C'est même de l'arrogance non ?

     

    Oui.

     

    Alors je comprends, d'où la fuite à cause de l'illusion.

     

    Oui.

     

    D'accord, néanmoins c'est une attitude qui ne peut naître que de l'attention parce que ce n'est pas ce que le conditionnement nous a appris.

     

    Oui. Tu sais, la plupart des gens croient des choses qui sont bien loin de la réalité, et ils ignorent pour l'essentiel les lois simples de la vie, peut-être que la scolarité comporte des lacunes, non ? (Sourire).

     

    L'acte ne change pas, c'est l'idée qu'on s'en fait qui ne correspond pas à la réalité et c'est tout autre.

    C'est quand même très fort.

    On peut dire que nous sommes complets parce que nous voyons enfin que l'on ne donne jamais à l'autre mais à soi et cela fait le miracle de la multiplication.

     

    Oui, tu viens de résumer tout l'enseignement du Christ, la fameuse bonne nouvelle !!!!

    Ce que tu me fais, c'est à toi que tu le fais.

    Ce que tu fais à l'autre, c'est à moi que tu le fais.

    C'est une histoire de vase communicant, on peut le prendre par n'importe quel bout, ça garde toujours le même sens.

     

    Ils sont tous là, tes mots, Ron : la rigueur, la modération, l'attention, la conscience, la connaissance, traquer, rêver, le silence, la mort, et celui qu'on n'ose plus l'amour.

    Tous sont un même et seul doigt, tous désignent une chose unique et pourtant multiple.

    Je t'entends : « Eh oui ! Encore une évidence ! » Alors dire encore que les évidences sont les perles rares, la rencontre avec l'essentiel en nous, et même avec « l'autre » au-delà de ce corps.

     

    Oui, mais qu'est-ce que l'amour sinon la joie que crée là conscience de « participer » et ce faisant, de se « fondre » en quelque chose qui nous dépasse et nous contient ?

     C'est une marche vers l'essentiel que de tendre vers ce qui se dit de plus silencieux en nous.

     


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  • Écoute encore...

    Ce que tu appelles le « désamour » ou l'éloignement fait partie d'un ensemble « amour-désamour », ce sont les mouvements naturels de la vie.

    L'un ne peut pas être sans l'autre, comme le flux et le reflux des vagues.

    Il n'y a pas de séparation possible entre ces deux-là.

    Il y a un moment où la porte doit se fermer si elle veut réellement s'ouvrir.

    Une porte qui reste ouverte n'est plus une porte, tout le monde passe sans même savoir qu'il vient de passer, ce n'est pas la vie.

    La vie c'est une séparation des corps les plus simples en même temps que la capacité lorsque l'opportunité se présente, de fusionner, annulant la séparation précédente et créant encore un nouvel espace de séparation.

    La vie implique la séparation parce qu'elle concerne une « partie », une individualité.

    Ce qui signifie pas qu'il y ait effectivement une complète séparation, l'individu se signifie par ses compréhensions et ses illusions, nous parlons donc de la séparation que représente pour lui la nécessité de se vivre comme un individu indépendant, c'est à dire libre de ses actes.

    Ce sentiment de séparation prend sa source dans nos croyances, parce qu'elles sont les poutres qui structurent notre entité individuelle.

    Oui, il nous est impossible de faire autrement, dans l'état actuel des choses.

     


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  • Mourir à l’attachement Michelle, c'est ne plus nourrir l'attachement. Et la corde qui te tenait tombe en poussière, c'est pour moi bien cela le détachement.

     

    Je ne décide pas de mettre fin, la fin survient parce que j'ai vu l'inutilité, la nocivité d'une chose.

     

    Voir l'inutilité ou la nocivité d'un lien, c'est changer le discours de la voix qui parle le plus haut. Au début la voix disait : « Ah !! Comme c'est super cette relation ! Comme elle me nourrit ». La voix ne laissait aucun autre argument contrecarrer son discours.

    Puis tout à coup des éléments nouveaux ont fini par s'insinuer et une autre voix s'est mise à parler haut elle aussi, elle dit : « Mais non, ce n'est pas si bien que cela, je me suis fait encore des idées, que je suis emporté dans mes sentiments ! Comme je vais vite ! »

    Et le lien s'atténue comme la corde lorsqu'elle a pris un coup de couteau, elle s'effiloche petit à petit.

    Tous ces processus qui se déroulent dans nos têtes participent de nos décisions, et nous n'en sommes pas souvent conscients.

    Il y a l'attachement, qui est le produit d'un discours issu de nos manques.

    Il y a le détachement, qui est un discours qui relativise les raisons de l'attachement, qui les remet en question.

    Il y a le non-attachement, qui est un discours issu d'une blessure, un refuge dans le non-mouvement, il faut faire attention à ne pas céder à celui-là.

     

    Je ne décide pas de mettre fin, la fin survient parce que j'ai vu l'inutilité, la nocivité d'une chose.

    Pourrais-tu être d'accord avec cette autre formulation ?

     

    Je préfère dire que nous décidons, mais cette décision ne nous entache pas, pour la plupart d'entre nous elle n'est pas consciente, l'honnêteté de la personne n'est pas en cause, ces décisions nous les prenons avec sincérité.

    En ce qui me concerne, je pratique depuis longtemps l'attention à ces processus, je sais presque toujours pourquoi j'aime et pourquoi je n'aime pas, pourquoi j'aime moins aussi, je peux le mesurer chaque jour, oui, chaque jour nous montons ou descendons dans notre « amour », cet amour qui n'est qu'un mot pour désigner la relation des êtres vivants.

    Toutefois il est plus juste de dire que « ça » se décide en nous, à partir de nos pensées qui coulent de ce que nous sommes, de ce que nous avons vécu aussi.

     

    Il y a en toi, quelque chose...

    Comme l'horizon jamais atteint... il en est ainsi, je crois de chaque personne, sauf que les autres aiment à créer de liens qui deviennent mortifères.

    Toi tu es là et les liens tu les brises sans cesse.

     

    Oui, nous sommes tous des horizons inatteignables pour les autres, et lorsque c'est ainsi, ça signifie qu'il n'y a plus de prétention à la capture.

     


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  • Et les sentiments ?

     

    Je te dirai ce qu'ils sont pour moi après avoir rappelé ce qu'ils sont pour les autres.

    Les humains ont des sentiments... pour leur épouse et leur mari, pour leurs amis et leurs enfants, pour leurs chiens et leurs chevaux. Quand ils s'expriment sur la nature de ce qui les lie à l'autre ils croient parler de « sentiments », après cela ils ne savent plus...

    Qu'est-ce que c'est que ce machin ? On leur a appris depuis l 'école que des sentiments s'éprouvaient... (Sourire).

    Mais pourquoi ? C'est parce que lorsqu'on a considéré qu'une chose avait une importance pour nous, son absence ou n'importe quoi qui menace la possibilité de vivre le contact avec cette « chose » se mue en une sensation très physique, aussi physique qu'une douleur à l'épaule.

    On ne sait pas assez que c'est une construction mentale, qu'elle s'installe conformément à des signaux auxquels on est plus ou moins sensible, selon notre éducation, notre origine, etc. Cette personne à qui on s'était tant attaché, ce qui signifie qu'on avait pris l'habitude de penser qu'il ne devait en être autrement, qu'elle nous appartenait. « Voilà qu'elle ne veut plus de nous, qu'elle nous trahit en fréquentant d'autres gens, qu'on a perdu à ses yeux cet intérêt qui fut source de nourriture, car c'est aussi de nourriture qu'il s'agit, cette personne... c'est décidé !!! Je ne veux plus l'aimer ! Tant pis pour elle ! Tant pis pour moi ! D'ailleurs elle ne le méritait pas ! ».

    Et voilà que le manque vient à manquer, que l'absence petit à petit ne se ressent plus, qu'on ne reprend ses habitudes d'avant.

    A condition bien sûr qu'on ne nourrisse pas l'espoir d'une récupération, d'un retour consolateur.

    Juste une construction mentale plus ou moins claire, plus ou moins subie, qui germe en des terrains qui n'attendent que cela, car nous venons au monde avec l'instinct du « manque » très envahissant.

    Nous décidons « d'aimer », ce qui veut dire : « d'avoir besoin de l'autre », et nous décidons de ne plus « aimer », ce qui veut dire : « de se passer de l'autre », tout cela sans liberté, sans grande conscience, et nous prenons les effets secondaires exprimés par notre chair pour une validation de nos beaux « sentiments », nos fameuses sensations.

    Le sentiment n'a rien à voir avec la relation dans le sens « ce que tu es pour moi, ce que je suis pour toi », mais dans le « sens de la perception », bien entendu lorsque je sens qu'une personne ne dit pas tout ce qu'elle sait, je l'exprime ainsi : « Je sens qu'elle cache quelque chose ». Tel est le sentiment selon moi. Il fait référence à des signaux qui seront des données pour mon « esprit » qui va les analyser, car il ne se passe rien d'autre n'est-ce-pas ? Quoi qu'il y ait devant moi, si mon esprit n'en pense rien, cela n'existe pas.

    On peut donc dire que le calcul que fait mon esprit est relatif, rien qui ne me fournisse une approche objective du « réel », mais rien non plus dont je puisse me passer.

    Au-delà de ma conscience personnelle et egotique, ça travaille, ça analyse, ça gère, ça invente, ça construit, ça dissèque, etc. Le sentiment est donc ce que mon « moi » conscient est capable de retenir captif dans ses pinces, parmi le flot des données qui transitent « au-dessus » de lui.

    Bon, je ne sais pas si j'ai réussi à dire cela clairement, si ce n'est pas le cas renvoie tout en cuisine et je réessaierai encore et encore.

     

    Ce qui est triste sans doute c'est d'être dupe de cela, de croire que nous sommes étrangers dans la décision de nos attachements et détachements.

    De ne pas être en mesure de comprendre ce qui se passe dans nos têtes.

    Moi je trouve cela merveilleux que le monde nous ait offert cette liberté dans la décision d'aimer, comment et jusqu'à quand aimer. Cela ne me rend absolument pas mélancolique.

    Je ne peux qu'apprécier ce cadeau de la nature, pour rien au monde je n'aurai souhaité que mes besoins, mes réactions, ma sensibilité soient téléguidés par des décisions externes.

     


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  • Il y a un point sur lequel je ne te suis pas dans tes paroles que je trouve justes dans leur ensemble, sauf quand tu dis que l'amour est passion et tu cites la passion du christ. « Définitivement l'amour est passion. La passion du Christ en témoigne ! »

    Je veux rappeler que le mot passion vient de « pathos » qui comme tu le sais signifie souffrance. Le Christ ne connut pas de souffrance par son amour, c'est par le refus des hommes qu'il connut cette souffrance, je crois qu'il faut être vigilant en cet endroit.

    L'amour ne sait faire souffrir mais c'est le contraire de l'amour qui fait souffrir, c'est son contraire qui est passion.

    L'amour est paix, calme et sérénité, il n'est pas doutes et questionnements, il n'est pas faim mais satiété. L'amour ne s'épuise pas, plus on le libère plus il grandit, donnant l'impression que c'est le vase qui grandit. Mais le vase lui, ne bouge pas, seul son contenu peut lui ajouter beauté et richesse.

     

    Évidemment mes mots portent la trace de la confusion qui m'habite encore, alors ce credo.

    Mais au-delà de la déformation, quelque chose de ce mouvement qui m’anime en profondeur, cherche à se dire. Quelque chose qui parle de dépasser toutes les peurs d'avancer en donnant tout de soi, s'oublier peut-être. C'est cela que j'appelle la passion.

    Tu dis vrai, l'amour n'est ni doute, ni questionnement. Dire ce qu'elle n'est pas, cette énergie, est bien la seule chose que nous puissions faire, aussi regarder ce qu'elle agit en nous...

    (Sourire)..., je sens encore souvent sa brûlure, aussi cette plénitude dont tu parles et à chaque nouvelle inspire du fluide vivant, oui, « cela » grandit.

     


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