• Du chemin (20)

    Y-a-t-il quelque chose d'infiniment important à quoi nous devrions rester attentifs à chaque instant ?

    Quelque chose qui nous permettrait d'aller en toutes circonstances d'un pas paisible, sans plus connaître cette errance que nous sommes à nous-mêmes ?

     

    Je te dirai : la « vie » ! Michelle.

    Mais tu ne te contenteras pas de cette réponse, qui s'en contenterait d'ailleurs ?

    Un seul mot de trois lettres, serait-il un jour une réponse ? La réponse à toutes les questions ?

    Nous allons dans la vie comme le funambule sur son fil à 300 mètres du sol, sans filet, sans sécurité aucune, si ce n'est nos illusions.

    En équilibre sur son fils, la pression de la mort de tous les côtés, à 360 degrés.

    Une seule issue pour connaître ce que l'instant d'après nous réserve, avancer tout doucement, délicatement en maîtrisant toutes les tensions nôtres, toutes les forces qui nous frappent et nous poussent vers la chute, vers la fin, vers l'incommensurable peur.

    Avancer centimètre après centimètre sans jamais regarder derrière, sans jamais regarder trop loin en avant, de peur que le fil ne disparaisse et qu'on ne sache plus où reposer son pieds.

    Et arrive l'inexplicable expérience, par surprise, dans un oubli intense de son petit « soi », le fil n'est plus séparé de nous, de notre souffle, il est l'air que nous respirons, l'eau que nous buvons, ses deux points de fixation ne sont pas ailleurs que dans notre chair la plus profonde.

    Et c'est cela que « vivre », écouter notre conservation intime, secrète, avec ce monde au creux le plus profond de notre chair.

     

    Je sais que c'est ainsi que tu vis.

    Cette relation, avec le monde, nous la connaissons tous, mais de façon épisodique, et bien souvent de manière inconsciente.

    De l'attention, à l'inattention, nous désespérons de ça, et cela entraîne bien de la souffrance, qu'on le reconnaisse ou pas.

     

    Nous allons sans décider de par ce monde Michelle, et il devient inexact de le dire ainsi : « nous allons », nos pensées, nous font aller où elles « veulent ».

    En fait, une part de nous « inconsciente », donc indépendante de la volonté de notre « moi » mène une activité intense dans la « pensée générale » sans que nous soyons naturellement invités à profiter du spectacle.

    Nous nous rendons compte quelquefois de cette activité souterraine lorsque de petits geysers de surface viennent nous éclabousser les chaussures.

     

    Nous ne sommes donc pas le « capitaine » à bord du navire qui porte comme nom : « penser ». Oui, ce nom n'est pas celui de notre navire mais celui de la mer sur laquelle nous voguons.

    Et notre navire n'est pas un vrai navire, mais juste un petit radeau, sur lequel nous avons entassé les quelques petites affaires que nous croyons posséder, mais qui dans les faits réels nous possèdent bien.

    Alors, avec tout cela, comment peut-on prendre la direction de nos « choix », de nos « pensées » ?

    En quittant la peur qui nous cloue à la surface de notre petit esquif, et en plongeant dans la mer avec l'intention de se transformer en petit poisson.

    Un radeau c'est grand à côté d'un petit poisson, mais combien de risques pour lui qui sont inexistants pour le poisson.

     


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